Le corps de
l'enfant, le toucher,
les autres et les mots
Le foetus et son
image
Le nourrisson
Les
pleurs
Le
langage corporel
Le toucher
Etudes
et recherches scientifiques
Le
foetus et son image
Le corps de
l'enfant prend image
lors
de l'
échographie
prénatale.
C'est un
moment clef durant lequel vont se
croiser deux
regards : celui de la mère qui porte la vie, dans toute sa
puissance, et celui de la médecine
: dépistages pour
les anomalies chromosomiques, les malformations et surveillance du
foetus.
"L'échographie
rassemble pour la
première fois en une seule image les deux aspects du foetus
:
celui qu'on voulait et qu'on ne veut pas" (L. Gourand).
Comment
laisser la
place à la réverie
maternelle
(Bion), aux croyances dans les compétences des
parents et les capacités du bébé
à se développer, tout en donnant des informations
concrêtes sur
l'enfant à venir, en introduisant le
doute, les vérifications
qui peuvent les dévaloriser ?
Peut être
en restant
attentif à ce que l'échographie
n'empêche pas le projet
parental, en demandant aux parents quelles sont leurs attentes, en respectant les
intérêts de chacun.
Alors
que
l'échographiste cherche l'anomalie,
considérant donc à priori chaque grossesse comme
anormale, et hanté par le défaut d'information
qui
pourrait l'amener devant les tribunaux (comme s'il était
tenu de TOUT voir), les parents vont à la rencontre de
leur bébé en développement.
Chaque
information qui leur sera donnée agira sur l'investissement
parental et
la
construction du lien d'attachement,
et influencera le
déroulement de la grossesse, la naissance, le
développement de l'enfant et la relation
parent-enfant.
Le nourrisson
Les pleurs et
le langage
corporel
de l'enfant nous signifient son bien être ou son
mal-être, en lien avec
les soins, les stimulations et les intéractions qu'il
reçoit des adultes qui s'occupent de lui.
Les
pleurs
Le
bébé pleure pour différentes raisons :
exprimer
ses besoins physiologiques, physiques ou sensoreils (faim,
soif,
fatigue, énervement, froid, chaud, douleur, couche
souillée, …) ou
exprimer des
besoins psychologiques, affectifs ou émotionnels (peur,
angoisse,
stress, solitude, ennui, tristesse,
désespoir, colère, douleur …)
Le nourrisson ne
dispose que de peu de moyens
pour celà. Les adultes et les enfants plus grands ont les
mots, expressions du visage et l'étayage
psychologique qui se construit peu à peu. Le
bébé utilise ses propres solutions : sons
d'impatience, de désaccord, cris, agitations et pleurs, pour
extérioriser
et évacuer
les émotions, les angoisses et les tensions qu'il ressent.
On ne
gâte jamais trop un bébé en
répondant à ses besoins. Si on peut le soulager,
il ne sert à rien de le faire
attendre. Si son besoin a trouvé une réponse,
l'enfant ne devra plus l'exprimer et cessera donc de pleurer ; de plus,
les pleurs sont souvent difficiles à endurer pour ses
parents.
Si on ne sait pas
le soulager, prendre le nourrisson dans ses bras, lui dire
qu'on l'entend, lui parler doucement, calmement, accepter et accueillir
ses pleurs, c'est déjà répondre
à son besoin d'être entouré, contenu.
On ne
pleure que lorsqu'on est en confiance...
Le bébé vous accorde sa confiance en s'autorisant
à se laisser aller dans vos bras. Il ne pleure pas sans
motif, aussi il suffit peut-être d'être
là
et de respecter
l'expression d'un besoin.
Le
langage corporel
(E. Buzyn)
"Lorsque
les
grandes fonctions
telles que le sommeil ou l'alimentation s'instaurent de
manière
inadéquate, le bébé utilise son corps
pour
exprimer son mal-être, le langage corporel étant
la seule
forme d'expression qu'il aie à sa disposition à
l'âge précoce d'avant la parole.
...on
peut émettre l'hypothèse du rôle majeur
d'une
mère qui nourrit son bébé : en
satisfaisant ses
besoins de façon adaptée, elle l'aide
à s'humaniser.
Nourrir un enfant consiste à s'adapter à sa
demande, tout
en lui faisant accepter la frustration progressive : le faire patienter
tout en communiquant avec lui pour combler son attente en le
nourrissant de paroles. Un bébé qui a compris
cela ne
pleure plus de façon pathétique ; il se contente
de
bougonner pour communiquer son désir et son impatience.
C'est
dans cette oralité en constante évolution que se
développe l'éventail de ses compétences
futures
: les sensations, les émotions, les affects, s'originent
dans
cette première expérience vitale que
représente la
nourriture.
Le tout-petit a
d'emblée l'intuition
de ce que ressent sa mère, en particulier lorsqu'elle est
anxieuse, c'est à dire présente et absente
à la
fois, au point qu'il ne ressent pas la sécurité
qu'il est
en droit d'attendre. Même s'il semble ne rien comprendre
à
ce qui se passe, il s'en trouve affecté, au point
d'altérer ses fonctions vitales (troubles du sommeil ou de
l'alimentation, auxquels s'ajouterons plus tard d'autres
symptômes tels que la dépression,
encoprésie,
énurésie, etc.) Mais il se trouve aussi que des
événements accidentels peuvent avoir une
incidence sur la
sérénité de la grossesse ou de la
naissance et un
effet traumatique sur la relation mère-enfant. Il est combatif,
ce
bébé qui, en interpellant ses parents
à sa façon, leur offre l'opportunité
de venir à bout de ce qui s'est mal résolu dans
leur histoire infantile personnelle".
Le
toucher
Le
nourrisson a
très tôt de grandes capacités.
Pour les concevoir, mettons-nous à sa place ! On
dépense beaucoup
d'énergie à réguler le stress,
à contracter nos muscles en situation
d'inconfort ou à faire abstraction d'une lumière
violente, d'un son
trop bruyant... lui aussi, et encore plus ! Aussi, un toucher
adapté et respecteux est important.
A. Grenier a
démontré les compétences d'un
nouveau-né, maintenu au niveau de la nuque et au niveau du
siège (ainsi sa
motricité est libérée),
à avancer les deux mains pour saisir un jouet qu'on lui
présente.
L'échelle
de T. B. Brazelton montre combien on peut obtenir de réponses
d'un bébé lorsqu'il est en position ni stressante
ni douloureuse.
Le
calme, la lumière non agressive, un visage souriant, une
voix musicale
qui lui parle, la chaleur des bras de ses parents, c'est autant
d'éléments qui favorisent le
développement harmonieux du nourrisson et
le lien d'attachement à ses parents.
Etudes
et recherches scientifiques
- La méthode
Kangourou
(N. Charpak) a observé que les bébés
prématurés ou de petit poids (mais aussi tous les
nouveaux-nés) mis peau à peau contre leur
mère, leur père et même leurs
frères et soeurs, dès la naissance, non seulement
survivent mais
se développent : mortalité un
peu plus basse, croissance comparable, sorties de la
maternité plus précoces, ce qui
entraîne une réduction des infections
nosocomiales intra hospitalières, comparé aux
prématurés en couveuse.
Elle
remarque surtout
la qualité
de la
relation mère enfant, la participation
du père et l’impact de la méthode
sur
la
qualité de l’environnement familial.
Le peau à peau provoque la montée de lait
et une production de lait maternel réussie, et le
bébé (quelque
soit son poids)
et la maman peuvent
s’endormir
sereinement.
Quand
on explique aux
parents qu’ils sont compétents et que
c’est par
eux que le bébé ira bien, non
seulement leurs sentiments de culpabilité d’avoir
un enfant prématuré ou de
petit poids, ou d’incompétence (qu’est
ce qu’il faut faire ?) disparaissent,
mais ils sont même fiers de pouvoir agir autant pour aider
leur enfant dans cet
moment de survie ou de vie en le portant contre eux ou en le massant.
Les mères
se restaurent et les pères osent prendre leur
place ; la fratrie n’est pas
non plus oubliée.
Plus
...
- Des
chercheurs en psychiatrie périnatale et
néonatologie
s'intéressent
aux bénéfices du massage pour
bébé pour des mères ayant une dépression postatale.
Ils
sont en train de prouver qu'en
plus d’aider à développer les interactions
mère-enfant, les ateliers de massages
pour bébé améliorent
aussi la
dépression
post-partum des mères
(c'est un autre
traitement que la consultation ou les médicaments).
C’est la première fois
qu'une amélioration d'interaction entre le
bébé et sa mère a
été établie. Le
bénéfice des ateliers de massage pour
bébé par leur mère était
très clair. Plus
...
- V.
K. Jump, une chercheuse du Early
Intervention Research
Institute de l’Université de l’Utah, a
mené une étude sur
le massage
auprès d'enfants vivant en orphelinat
et sévèrement privés de
contacts physiques
en Équateur. Ses résultas ne sont pas
définitifs, mais démontrent que l'interaction,
minime au départ, s'est grandement
améliorée de même que le langage et les
bébés semblaient plus heureux, et en
meilleure santé.
Plus...
- Enfin,
citons les travaux effectués
sur les ratons par le Docteur Michael
MEANEY et de ses
collègues de l'Hôpital Douglas de
Montréal sur les caresses
maternelles et
leurs bénéfices dans le développement
génétique de l'enfant
Plus...
-
et les recherches
de Tiffany FIELD du Touch Research Institute de University of
Miami
School of Medicine, sur l’importance du toucher
Plus...
L'enfant
et les autres
L'enfant apprend peu à peu à se
connaître lui-même
et à se représenter l'autre. Etre
semblable (humain) et distinct (mentalement et
physiquement) à la
fois... pour communiquer, collaborer et pour se protéger.
Les expériences
précoces
Quelques
minutes
après sa naissance, le nouveau-né est capable de
mémoriser assez d'informations sur le visage de sa
mère
pour pouvoir le distinguer
de celui d'une autre personne. Il va regarder plus longtemps
les
traits de ce visage (s'il lui est présenté
à 20-30
centimètres) Ces réactions n'indiquent pas
cependant
qu'il reconnaît sa mère ou une autre personne
comme un
autre que lui.
Le
nourrisson apprend très tôt à anticiper.
Il anticipe que lorsqu'un visage arrive vers lui, c'est avec un
sourire, une voix douce, chantante ("le mamamé"), et si ce
visage est fermé ou inexpressif, l'enfant se montre surpris,
gêné, décontenancé, il
détourne son
attention, peut se mettre à pleurer. Il anticipe
également l'alternance de la prise de parole lors d'un
dialogue.
L'enfant de 9 mois environ sait discriminer
les sons et reconnaître ceux de sa propre langue.
Il perd
peu à peu ceux qui ne sont pas
représentés dans la
langue usuelle, au point qu'un enfant adopté à 5 ans n'a aucune
sensibilité à sa langue maternelle,
à l'âge adulte.
La conscience de soi
La conscience de soi,
qui prime sur la reconnaissance de sa différence aux autres
(travaux de R. Zazzo), se construit dans l'interaction de
l'individu avec l'environnement.
Vers 6 mois, l'enfant sourit davantage au miroir
lorsqu'il y voit le reflet d'un autre que lorsqu'il
voit son image, ce sont les
prémisses de la conscience de soi.
Vers 10 mois, le bébé montre d'autres signes de
conscience de soi : il regarde "en cachette" l'adulte
qui s'occupe
de lui avant de faire un interdit (jeter un objet, ...), il a
conscience qu'on le regarde, qu'on le surveille.
Et les attitudes
sociales
pour attirer l'attention (sourires, grimaces, agitation...) sont pour
certaines un moyen d'attirer l'attention vers lui, donc une conscience
de soi.
Celle-ci n'est avérée tout à
fait que vers 18 mois : une tache est mise à
son insu sur son front et l'enfant, se
reflétant dans le miroir, porte sa main
à la marque (et non au miroir), c'est bien que ce qu'il voit
le renseigne sur son
propre état.
La différence
entre soi et les autres
"Faire
la différence
entre soi et les autres
suppose aussi pouvoir reconnaître leur action comme identique
à la nôtre, alors que nous ne percevons pas ces
dernières de la même manière : quand on
fait un
geste, quantité d'informations nous sont
apportées par
les voies sensori-motrices, absentes quand c'est quelqu'un d'autre qui
agit" (S. de Schonen) L'imitation et la
représentation mentale d'une action aident à cela.
La "théorie
de l'esprit"
L'enfant
éprouve très jeune de la compassion, de
l'empathie pour
une personne proche qui est triste ou mal, il s'agit de la "théorie de
l'esprit"
: à partir de 18 mois environ, nous avons tous une
théorie générale du fonctionnement de
l'esprit de
l'autre (de ses pensées, intentions, désirs).
Cette
"théorie
de l'esprit" n'est opérante que vers 3 ou 4 ans. L'exemple
qui
caractérise est le suivant : on met en
scène devant
lui deux
personnes, A cache un objet à un endroit sous le
regard
de B qui sort ensuite de la pièce. En son absence,
A change
l'objet de place. B revient et on demande à l'enfant
où B
va chercher l'objet. Vers 3 ou 4 ans, l'enfant peut distinguer ce qu'il
sait et ce que savent respectivement A et B. Avant, il indique le
second emplacement.
Le
corps et les mots
Les relations
entre le
bébé
et son environnement commencent par le corps. On le prend dans
ses
bras, on l'allaite, on le berce, on le change, on le masse, ... Le toucher est
essentiel, vital.
Le langage
du nouveau-né est
corporel. Il se laisse aller avec confiance, il se tortille, il pleure,
... Cependant, le corps sans le psychisme n'existe pas, et la prise
dans le corporel est toujours là, même quand les
mots
prennent corps.
La parole, ce n'est pas simplement les mots, cela peut aussi
être une trace, un dessin, un signe, un geste... La communication
offre de multiples facettes. La relation est
plurielle.